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Gros plan d'un poisson rouge isolé sur fond blanc

Le poisson rouge et le hareng rouge : pourquoi la capacité d’attention n’est pas le problème dans vos formations

Notre capacité d’attention est-elle inférieure à celle d’un poisson rouge? Si nous croyons certains articles dans les médias, la capacité d’attention de tout le monde est en train de diminuer (comme ici et ici). D’un autre côté, si vous y regardez de plus près, il existe un grand nombre d’arguments contraires (comme ici et ici), qui clament que non, en fait notre capacité d’attention ne diminue pas, et les recherches qui le révèlent disent qu’on étudie simplement le mauvais élément.

Pourquoi la réponse est-elle importante? Dans le cadre de la formation de votre équipe, il est important de savoir si (et pendant combien de temps) les apprenants porteront leur attention sur vous. Peuvent-ils rester assis toute une journée, ou êtes-vous aux prises avec une préférence pour une formule TikTok? Si le vrai problème est en fait un phénomène de société (p. ex., tout le monde a un déficit d’attention), il peut sembler qu’il n’y ait rien à faire pour rendre la formation plus captivante, sauf la raccourcir. Mais est-ce bien vrai? La réponse est étonnamment directe.

Le problème

« Mes camionneurs ne peuvent pas se concentrer aussi longtemps. » « Tout ce qu’ils veulent, c’est une formation plus courte. » Il existe une perception de longue date selon laquelle les conducteurs n’aiment pas suivre des formations (et d’ailleurs, ils en veulent le moins possible), et cela précède les récents débats sur la capacité d’attention et de concentration. Mais poursuivons dans cette veine quelques instants, et considérons si oui ou non, la capacité d’attention est un enjeu.

Si vous consultez les liens vers les articles ci-dessus, vous verrez qu’il existe au moins un certain désaccord sur ce qui se passe avec l’attention, et même un désaccord sur ce qui est étudié. L’une des raisons qui font que différents chercheurs fournissent des réponses contradictoires, c’est qu’ils étudient différents éléments. Une chercheuse pourrait évaluer le temps qu’un sujet fixe un document qu’il vient d’ouvrir dans Microsoft Word, avant qu’il ne regarde quelque chose d’autre. Un autre pourrait examiner la fréquence à laquelle un étudiant gigote durant un cours magistral. Et un autre pourrait étudier un autre aspect.

Pour ce qui est de nous, les « non chercheurs », nos propres expériences nous fournissent des preuves contradictoires. D’une part, bon nombre d’entre nous avons fait défiler de courtes vidéos sur nos téléphones inconsciemment, les regardant pendant moins d’une minute. De l’autre, si vous avez déjà regardé une série en rafale sur Netflix, passé deux heures à regarder un film ou lu un livre à un enfant des dizaines de fois, vous avez la preuve que la capacité d’attention n’est pas du tout une cause perdue. Alors, quelle est la vérité?

Que se passe-t-il?

La capacité d’attention des gens a-t-elle vraiment diminué? La réponse est que notre capacité d’attention intégrale, dans tous les contextes, ne peut pas être mesurée d’un seul coup. Regarder un document Word (puis regarder ailleurs), ce n’est pas la même chose que de jouer à un jeu de société ou de suivre une formation sur la sécurité, ou encore, de regarder un film (fait cocasse : la longueur moyenne des films hollywoodiens depuis les 40 dernières années a augmenté, et non diminué). Donc, quand les chercheurs font des déclarations généralisées sur ces sujets, il faut prendre tout cela avec un gros grain de sel.

Existe-t-il plus de distractions depuis les 10 ou 15 dernières années? Évidemment. Nuisent-elles à notre concentration sur des trucs qui ne nous intéressent pas trop (comme les documents Word ou des vidéos en ligne aléatoires)? Absolument. Mais cela ne nous dit pas grand-chose sur ce qui se passe dans le contexte de la formation sur la sécurité.

La vérité, c’est que l’attention est orientée vers un objectif (voilà un concept sur lequel tous ces chercheurs sont d’accord); le degré et la profondeur de l’attention que nous portons sur quelque chose dépend de la clarté de l’objectif qui s’y rattache, à quel point cet objectif est désirable, et le caractère stimulant du processus pour l’atteindre. Si votre esprit arrive à se concentrer sur un film pendant deux heures solides, c’est probablement parce que l’histoire est intéressante, que le film est bien produit et que vous êtes investi dans le sort du héros. Mais si vous faites défiler de courtes vidéos de chats à l’infini sur votre téléphone, c’est parce que vous n’êtes intéressé que pendant quelques secondes, et que vous ne vous attendez pas à en tirer grand-chose.

Pareillement, si un camionneur déclare que la formation prend trop de temps et qu’il souhaite qu’elle soit plus courte, mais que cette soirée-là, il passe quatre heures à regarder une série en rafale dans sa cabine, ce n’est pas la capacité d’attention qui est le problème.

Si vos chauffeurs regardent leurs téléphones pendant une formation en classe, ce n’est probablement pas parce que l’humanité échoue de façon magistrale en matière de capacité d’attention. C’est peut-être plutôt une question d’ennui. Le problème réside dans le contexte et l’objectif, et non dans la capacité d’attention. Vous pourriez organiser votre contenu pour qu’il soit plus court et plus accrocheur, pour attirer le moindre degré d’attention avant qu’ils ne se penchent de nouveau sur leur téléphone. Mais tout ce que vous faites, c’est admettre que votre matériel n’est pas assez intéressant et que l’objectif n’est pas suffisamment ancré chez vos gens.

Le bilan

Alors, quel est le problème? Je ne crois pas que les conducteurs veuillent moins de formation en général (tout comme les athlètes professionnels qui comprennent que la valeur des entraînements supplémentaires les aide à exceller). D’ailleurs, selon le plus récent sondage pour conducteurs dans le cadre du programme Les flottes les plus en vue (Best Fleets to Drive For®), plus de 90 % des participants étaient d’accord ou tout à fait d’accord sur le fait que la formation continue est importante.

Toutefois, il peut y avoir des obstacles bien légitimes à obtenir le soutien des conducteurs, et leurs raisons pour réclamer des formations plus courtes. Par exemple :

Si les chauffeurs réclament des formations plus courtes, il est probablement peu utile d’attribuer cela à un déficit de l’attention. Songez plutôt à qu’est-ce qui pourrait bien se passer en arrière plan. Il y a de bonnes chances que l’enjeu réel se situe dans le degré d’attachement que portent les conducteurs à la culture de formation en tant qu’objectif, et dans quelle mesure le matériel didactique est actuel, pertinent et contextuel (et, s’ils sont rémunérés ou non). Les arguments qui résument les problèmes de formation à des déficits d’attention au niveau sociétal sont des harengs rouges, et il est probablement préférable que ces arguments reposent avec les poissons (rouges).