Payer à l’heure ou au kilomètre : lequel est plus sécuritaire?
Le 19 septembre 2023
« Roulez avec Rick » est une série de voyages qui aborde les actualités, les gens et les idées inspirantes propres au secteur mondial du camionnage, alors qu’il se rend à des événements de l’industrie partout en Amérique du Nord. Dans cette chronique, Rick s’est rendu à la National Private Truck Council’s 2023 Safety Conference, à Orlando, et il a participé à une table ronde sur l’impact des différentes structures salariales des camionneurs sur la sécurité.
Rick Duchalski est spécialiste des communications chez CarriersEdge.
La façon dont vous payez vos camionneurs a-t-elle une influence sur la sécurité? L’un des arguments stipule que si vous payez vos conducteurs à l’heure, ils ralentiront, recevront moins de contraventions pour vitesse excessive, causeront moins d’accidents, car ils sont moins susceptibles de chasser des kilomètres de plus pour étoffer leur chèque de paie. Et voilà. Payer à l’heure signifie une flotte plus sécuritaire.
Mais est-ce bien vrai? Cette question fut le point de mire d’une table ronde à la National Private Truck Council’s Safety Conference de cette année, à Orlando. Le congrès a accueilli plus de 400 participants, mais cet atelier en particulier comprenait environ 40 personnes, comme des propriétaires de flottes, des gestionnaires de la sécurité, des camionneurs et plus, et provenaient de différents secteurs. En outre, le groupe en question représentait toutes les structures salariales imaginables – certains étaient payés à l’heure, d’autres au kilométrage ou à la pièce, quelques-uns gagnaient un salaire annuel, etc.
Ceci dit, la paie à l’heure c. celle au kilomètre semblait être une question de faits : Divisez les entreprises en deux groupes selon la paie, calculez leurs chiffres selon les accidents évitables et inévitables du Department of Transportation et examinez les résultats. En réalité, c’est plus subtil que cela, comme l’a rapidement démontré le groupe de la table ronde. L’un des gestionnaires de flotte a fait remarquer qu’en tant qu’entreprise qui paie à l’heure, elle n’avait pas reçu de contravention pour excès de vitesse ni d’infraction au Code de la route depuis six ans. Un autre a mentionné que cela faisait quatre ans pour sa société (en payant leurs conducteurs 45 $/h). Je n’étais pas certain si les gens dans la salle étaient en état de choc ou jaloux. Et encore, un autre propriétaire de flotte (qui payait à la pièce) a aussi déclaré de bons chiffres et un faible roulement du personnel (mais, les chiffres n’étaient pas aussi étonnants que les deux premiers). Une quatrième entreprise qui payait aussi à l’heure a constaté que ses résultats en matière de sécurité n’étaient toutefois pas excellents.
La question se pose donc : pourquoi y a-t-il une différence dans le rendement sur la sécurité, même parmi des entreprises dont la structure salariale est la même? La réponse est une culture d’entreprise axée sur la sécurité.
La journée d’avant au congrès, Charlie Fetters, vice-président de la logistique nationale chez Clean Harbors et John Robbins, directeur principal de l’exploitation chez Standard Logistics, avaient décrit ce que signifiait avoir une culture de la sécurité dans son entreprise. Beaucoup d’entre elles peuvent s’en vanter, mais cela prend une bonne dose de leadership, de la vigilance et les bons processus de communication avec toute l’équipe. M. Fetters a cité trois éléments en particulier :
- Mesurez-le
Fetters a appelé cela le score de sécurité, et il s’agit d’avoir des objectifs mesurables pour des comportements spécifiques. Vous devez mesurer exactement ce que vous souhaitez changer et vous assurer que vos objectifs sont clairs et atteignables. Si vous voulez en finir avec les excès de vitesse, vous devez surveiller constamment ces événements, et en faire un suivi dans les plus menus détails pour savoir où concentrer vos efforts.
- La formation
Avoir des attentes envers un comportement sécuritaire n’est qu’un côté de la médaille, de l’autre, vous devez vous engager à fournir une formation robuste et continue (au-delà des trois premiers mois) afin que les camionneurs acquièrent les compétences dont ils ont besoin. Faire le suivi et rafraîchir leurs connaissances régulièrement devrait faire partie intégrante de la culture d’entreprise.
- Voir d’un autre œil
M. Fetters fait référence aux déclarations d’accidents évités de justesse, où l’on motive l’équipe à regarder l’environnement de travail d’un œil critique, c’est-à-dire s’il y a de la congestion dans l’établissement ou des activités risquées dans la cour? Peu importe de quoi il s’agit, l’équipe devrait être en mesure de remarquer ces risques, de les signaler et d’avoir le pouvoir d’agir en conséquence, y compris la capacité d’interrompre les tâches jusqu’à ce que le problème soit réglé.
Ce dernier point semble crucial : Une véritable culture de la sécurité signifie que chaque employé place cette lentille dans tout ce qu’il fait, et non pas seulement les membres de la direction.
Au gré de la discussion avec le groupe de la table ronde, il semblait que ce dont MM. Fetters, Robbins et beaucoup d’autres parlaient la veille s’ajoutait à notre conversation. Le groupe a commencé à souligner l’importance de discuter de la structure salariale des camionneurs dans le contexte de la culture de la sécurité de l’entreprise. Votre méthode de rémunération est moins importante que la culture de l’entreprise, ainsi que des moyens spécifiques que vous employez pour motiver vos conducteurs (boni sur la sécurité, rémunération pour la formation suivie, etc.)
À notre sortie de l’atelier, l’un des participants qui n’avaient rien dit pendant la discussion m’a arrêté. Il m’a raconté qu’il y a longtemps, il travaillait chez un transporteur qui payait au kilomètre, et qui a ensuite changé pour une rémunération à l’heure. Il a constaté qu’une méthode n’est pas nécessairement plus sécuritaire que l’autre, lorsqu’on tient compte de tous les problèmes de sécurité possible : la rémunération à l’heure a entraîné une baisse des contraventions pour excès de vitesse, certes, mais un changement de structure salariale signifie seulement devoir gérer des problèmes de sécurité dans d’autres tâches. Les conducteurs peuvent ne pas porter attention à l’arrimage des cargaisons, de la sécurité dans la cour et plus.
Alors, est-ce que payer à l’heure ralentit les gens? C’est possible. Mais si vos employés ne sont pas formés, si vous problèmes ne font pas l’objet d’un suivi et si votre équipe n’a pas la capacité de détecter les risques dans une situation avant qu’ils ne deviennent de vrais dangers, aucun fignolage de votre structure salariale n’entraînera une meilleure sécurité globale. Si vous n’avez pas une bonne culture de la sécurité pour appuyer votre méthode de rémunération, vos changements se résument simplement à déshabiller Pierre pour habiller Paul.
La National Private Truck Council’s 2023 Safety Conference a eu lieu à Orlando, en Floride, du 6 au 8 septembre.